NOC

NOC

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L’humanité est endoctrinée pour accepter le présent et croire en l’avenir promis par l’Administration. Toutefois, les événements qui ont conduit à la situation actuelle sont aussi nébuleux pour elle que la raison d’être de l’Objet-Dieu.


Qu’elles soient le produit d’investigations approfondies ou de superstitions populaires, les rumeurs et légendes sont innombrables et systématiquement rejetées par le Ministère de l’Harmonie. Ce dernier est seul autorisé à dicter la vision conforme du destin de la Terre depuis l’arrivée de l’Artefact.  


Voici ce récit si se n’est là l’Histoire, c’est en tout cas une histoire.  


Celle d’un crépuscule



CONTACT


Lorsque l’objet fut détecté, il s’ajouta à la longue liste des corps célestes errant dans le vide spatial.

Il attira l’attention des hommes par sa masse fabuleuse, sa trajectoire étrange, sa forme inédite. Bientôt, toute l’humanité eut le regard levé vers les abysses stellaires.

La conclusion d’années d’analyses tomba comme une sentence. La chose se dirigeait droit sur la Terre. L’oblitération totale était inévitable.


L’annonce du cataclysme plongea le monde dans le chaos.

Lors que les conflits s’épuisaient, que la civilisation affrontait son défi le plus invraisemblable, l’humanité chercha à rejoindre les profondeurs.

Peut-être pour survivre, peut-être pour ne pas contempler le visage de son ultime défaite.

Alors, l’objet ralentit sa progression.

En moins de deux jours, l’Artefact engloutit l’horizon, morceau par morceau.

Lorsque le ciel lui eut cédé la place, il se referma sur la Terre, l’emprisonnant tout entière dans sa structure. Ses lueurs se substituèrent aux étoiles.

Le deuxième jour, les Axes surgirent. Immenses pointes de métal noir, ils fondirent vers le sol pour ne plus jamais lâcher prise. Barrant de loin en loin l’horizon, ils affermirent l’étreinte de l’Artefact

Tout était fini. Il était là, tapi au-dessus des nuages, aussi noir que la mort, sa structure zébrée de mystérieux éclairs.

Ainsi survint son avènement. Ainsi tomba la nuit.



RÉSISTANCE



Sans lumière, sans chaleur, on se prépara à la mort de toutes choses.

C’est alors que les Faisceaux apparurent, d’immenses rayons de lumière qui balayaient épisodiquement la surface de la Terre

Contre toute attente, les Faisceaux entretenaient un semblant de vie, substituant leur éclat malsain à la lumière du soleil.

L’humanité comprit que ses bâtisseurs ne l’avaient pas conçu pour la destruction mais pour la soumission.

La résistance s’organisa.

Dans les zones qui avaient survécu au chaos, les reliquats de gouvernements mirent leurs populations au pas, matant les rébellions dans le sang au nom du seul objectif qui avait encore un sens : la guerre contre l’Artefact.

L’humanité pointa ses armes les plus puissantes sur la carapace et déchaîna un feu désespéré.

Il n’eut pas d’effet. L’objet paraissait indestructible.  

Elle se lança enfin dans un corps-à-corps suicidaire. Ses soldats marchèrent sur les Axes et y découvrirent des passages où ils s’engouffrèrent, héroïques.

Ce fut une période de folie et de barbarie.  

Se sachant condamnée, l’humanité poussa toujours plus loin l’engagement, avec l’espoir dérisoire d’entraîner l’envahisseur dans sa propre chute.

D’un souffle, l’objet châtia les hommes. L’électricité disparut de la surface de la Terre.

La civilisation s’effondra.  

Les derniers rêves de la résistance furent jetés parmi  
les décombres et les cadavres.  

L’Artefact avait refusé aux hommes l’autodestruction pour leur imposer l’asservissement.  

Celui que l’on appelait désormais l’Objet-Dieu avait  vaincu. La guerre était perdue.


SOUMISSION


Le monde disloqué avait renoncé au combat et s’efforça de panser ses plaies, incapable toutefois de raisonner ses démons.

La Terre avait basculé dans un âge de royaumes et de tribus.  

Pourtant, dans les profondeurs, la renaissance se préparait, comme si les Axes y avaient planté une graine salutaire.

Dans la nuit, le sol s’ouvrit et la lumière en jaillit.  

Partout, telles de jeunes pousses tendues vers l’avenir, des hommes et des femmes émergèrent d’installations souterraines : les Hypogées.

Ces Messagers, qui arboraient tous les visages des premières victimes disparues dans l’Artefact, offrirent à l’humanité médusée une révélation, et une solution.

La révélation concernait l’Objet-Dieu.

Il n’était pas un ennemi. Il n’était pas une prison.  

Il était un bouclier érigé contre le mal absolu qui faisait rage dans l’univers.

Sans lui, l'humanité auraient été réduits à néant

En son sein protecteur, l’humanité devait se relever et révérer le don céleste qu’il représentait.

Ainsi les Messagers révélèrent-ils l’Administration.

Pleinement constituée et opérationnelle, l’Administration se répandit sur le monde, rétablissant la civilisation.  

Elle était touchée par la grâce de l’Objet-Dieu et désirée par lui.

Il n’était d’autre choix pour qui désirait survivre que de vénérer l’Objet-Dieu et d’obéir.

Pour l’Objet-Dieu, l’amour et la crainte.

Pour l’Administration, l’obéissance et la conformité.

Telle était la parole des Messagers.

Telle est la Voie tracée vers la lumière.




« Il est difficile de concevoir comment nos  
aînés reçurent la révélation de l’Artefact,  
mais j’imagine que la terreur qu’ils ont  
éprouvée à son arrivée est proche de
Celle que nous ressentirions s’il nous  
abandonnait aujourd’hui. »